vendredi 10 octobre 2014

Le plaisir spirituel d’être un peuple

Le pape François nous étonne toujours par ses audacieuses initiatives pour se faire proche de tous, surtout des pauvres de toutes catégories. Dans La joie de l’Évangile (par. 268ss), il explicite les raisons évangéliques de ce style apostolique.  Pour être d’authentiques évangélisateurs, il faut développer « le goût spirituel d’être proche de la vie des gens, jusqu’à découvrir que c’est une source de joie supérieure. » Car en regardant Jésus en Croix, « nous redécouvrons qu’il veut se servir de nous pour devenir toujours plus proche de son peuple aimé. »
 
L’Évangile nous montre Jésus proche de tous. « Quand il parlait avec une personne, il la regardait dans les yeux avec une attention profonde pleine d’amour : “Jésus fixa sur lui son regard et l’aima” (Mc 10, 21). Nous le voyons accessible, quand il s’approche de l’aveugle au bord du chemin (cf. Mc 10, 46-52), et quand il mange et boit avec les pécheurs (cf. Mc 2, 16), sans se préoccuper d’être traité de glouton et d’ivrogne (cf. Mt 11, 19). Nous le voyons disponible quand il laisse une prostituée lui oindre les pieds (cf. Lc 7, 36-50) ou quand il accueille de nuit Nicodème (cf. Jn 3,1-15). Le don de Jésus sur la croix n’est autre que le sommet de ce style qui a marqué toute sa vie. »
 
François nous invite à nous laisser séduire par ces exemples. Jésus veut que nous touchions la misère humaine, la chair souffrante des autres, que nous entrions en contact avec l’existence concrète des autres et que nous connaissions « la force de la tendresse.» Alors, « nous voulons nous intégrer profondément dans la société, partager la vie de tous et écouter leurs inquiétudes, collaborer matériellement et spirituellement avec eux dans leurs nécessités, nous réjouir avec ceux qui sont joyeux, pleurer avec ceux qui pleurent et nous engager pour la construction d’un monde nouveau, coude à coude avec les autres. »
 
L’œuvre d’évangélisation enrichit alors l’esprit et le cœur, « nous ouvre des horizons spirituels, nous rend plus sensibles pour reconnaître l’action de l’Esprit, nous fait sortir de nos schémas spirituels limités. En même temps, un missionnaire pleinement dévoué expérimente dans son travail le plaisir d’être une source, qui déborde et rafraîchit les autres. (…) Personne ne vit mieux en fuyant les autres, en se cachant, en refusant de compatir et de donner, en s’enfermant dans le confort. Ce n’est rien d’autre qu’un lent suicide. »
 
« Brisons les murs, pour que notre cœur se remplisse de visages et de noms! »
 
Est-ce là un programme que je veux et peux mettre en application? Quel est le pas que je suis appelé à faire aujourd’hui en ce sens?
(44e texte d’une série sur la joie)
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau