Les
descendants de Noé, en commençant par son fils Cham, ont brisé l’alliance
divine que Dieu avait conclue avec tous les humains et la nature entière lors
de la création. C’est ce que nous raconte la fin du chapitre 9 et les chapitres 10
et 11 de la Genèse. On y lit que Dieu
voulait un ordre cosmique, social et religieux marqué par la pluralité des
nations dans le respect mutuel et la paix. Mais, dans son orgueil, l’humanité a
voulu faire elle-même cette unité selon son propre modèle : l'uniformité.
Alors, Dieu décide de faire cesser la construction d’une telle civilisation, cette
« tour de Babel », et disperse les humains sur la terre. Puis,
pour rassembler cette humanité dispersée, Dieu choisit Abraham avec qui il
fera deux alliances (Genèse
12ss). Ainsi en lui seront bénies toutes
les nations de la terre.
Le premier
récit se trouve dans Genèse 15. Toute
l’initiative de cette alliance vient de Dieu et de sa bienveillance. Et elle
vise une vie de communion, d’amitié entre les deux partenaires : Abraham
sera nommé « l’ami de Dieu ». Mais ce nomade venu de Mésopotamie
s’appelle alors Abram et il vit encore des idées païennes de ses ancêtres. Dieu
se fait connaître à lui comme le vrai Dieu, le vivant présent dans toutes les
circonstances de sa vie. Abram peut toujours compter sur lui avec confiance.
Car Dieu sera son fidèle allié et ami. Il lui promet une descendance et une
terre. Abram ose croire à la promesse incroyable de Dieu : son couple est
stérile et la terre est déjà possédée par les Cananéens. Abram ouvre son coeur
à Dieu et lui soumet ses questions, auxquelles Dieu répond par une alliance.
Abram
apporta les animaux demandés par Dieu. Il « les partagea par le milieu et
plaça chaque moitié vis-à-vis de l'autre; cependant il ne partagea pas les
oiseaux. Les rapaces s'abattirent sur les cadavres, mais Abram les chassa.
Comme le soleil allait se coucher, une torpeur tomba sur Abram et voici qu'un
grand effroi le saisit. Yahvé dit à Abram : “Sache bien que tes
descendants seront des étrangers dans un pays qui ne sera pas le leur. Ils y
seront esclaves, on les opprimera pendant 400 ans. Mais je jugerai aussi la
nation à laquelle ils auront été asservis et ils sortiront ensuite avec de
grands biens. Pour toi, tu t'en iras en paix avec tes pères, tu seras enseveli
dans une vieillesse heureuse.” […] Quand le soleil fut couché et que les
ténèbres s'étendirent, voici qu'un four fumant et un brandon de feu passèrent
entre les animaux partagés. Ce jour‑là Yahvé conclut une alliance avec Abram en
ces termes : “À ta postérité je donne ce pays, du Fleuve d'Égypte jusqu'au
Grand Fleuve, le fleuve d'Euphrate.” »
Par cette
alliance, Abram reçoit la garantie que Dieu l’accompagnera dans ses
cheminements et n’abandonnera pas ses descendants. Les rapaces représentent les
dangers dans sa vie et dans celle de sa large famille. Mais ils seront chassés.
Malgré les échecs et dangers qui s’accumuleront sur le chemin d’Abram et de ses
descendants, la parole de Dieu est irrévocable et en Abram seront bénies toutes
les nations de la terre.
Il faut
noter que Dieu seul passe entre les quartiers des animaux immolés. Par là,
Dieu jure par serment sur lui-même que sa promesse est solide. L’alliance de
Dieu est un don qui ne vient que de la miséricordieuse fidélité divine. Dieu
donnera un fils, une descendance innombrable comme les étoiles du ciel et le
sable de la mer, une terre où ruissèleront le lait et le miel, tel que promis.
Abram, lui,
est appelé à la confiance absolue et à marcher selon les indications de la
parole divine. Au cœur des contradictions et des multiples épreuves, il doit
vivre dans une foi attentive, accueillante, audacieuse et tenace, en restant
toujours disponible au projet divin sur lui et sur l’humanité dont il porte la bénédiction
pour des générations et des générations.
Cette
figure d’Abraham le croyant doit être notre guide pour que, Église, nous soyons
ensemble un phare dans ce monde obscur. Notre culture actuelle a bien besoin
d’un peu de lumière pour trouver des chemins de paix, de réconciliation et de
construction d’un monde fraternel. N’est-ce pas là un appel pour toutes les
personnes, dont nous sommes, qui se reconnaissent enfants d’Abraham?
Évêque émérite de Gatineau