dimanche 5 mai 2013

25 ans en Outaouais

Le 6 mai marquera le vingt-cinquième anniversaire du début de mon service comme évêque du diocèse de Gatineau. À l’approche de cet anniversaire, bien des souvenirs viennent se bousculer dans la mémoire de mon cœur.

J’étais évêque à Baie-Comeau depuis près de dix ans, y ayant été ordonné évêque le 31 juillet 1979. Ces années furent intenses avec un peuple que j’ai appris à connaître et à aimer dans sa riche variété. Ce fut une belle histoire d’amour.

Le nonce apostolique, au début de la semaine sainte 1988,  me rejoint par téléphone dans l’usine de bouletage de fer de Pointe-Noire, où j’étais en visite pastorale. Il m’annonce que je suis nommé au siège épiscopal de Hull. Ce fut un choc! Je n’avais jamais pensé à une telle possibilité.

Malgré l'émotion très forte du moment et le bruit dans une telle usine, mon réflexe fut en harmonie avec ce que je répétais dans ma prière depuis tant d’années : « Fais de moi ce qu’il te plaira… » Je suis allé vivre une retraite à Oka. J’ai mis de l’ordre dans les dossiers. J’ai fait mes bagages.

Le 25 avril, fête de saint Marc l’évangéliste, j’ai pris congé de la communauté de Baie-Comeau. La cathédrale était pleine. Ce fut une célébration pleine d’émotions et de vive chaleur ecclésiale dans l’amitié. Je me rappelle l’homélie : ce fut une communication  très intense. Malgré les nombreux contacts et les incessantes communications vécues durant neuf ans avec les populations de ce territoire (visites multiples, radio, télévision, textes sur les journaux, etc.), je sentais ne pas avoir eu le temps d’offrir à ce Peuple de Dieu de la Côte-Nord l’Évangile dans sa beauté et sa vitalité. Je partais avec une sorte d’insatisfaction dans le cœur.

Mais, sans doute inspiré par l’évangéliste Marc, je voulais regarder vers l’avenir : « Va où je t’envoie. » Très tôt le lendemain matin, je quittais Baie-Comeau pour Hull, avec mes bagages dans la voiture et au cœur une tempête d’émotions entrechoquées. Ce fut une très longue journée!

Pendant deux heures et trente environ, j’ai traversé village après village, jusqu’à Tadoussac. Que de souvenirs en chaque lieu! En passant à Betsiamites puis à Escoumins, je me suis rappelé l’accueil toujours si chaleureux que les groupes de la nation innue m’ont réservé, partageant dans la confiance fraternelle foi, prière, joies, peines, espoirs.

Puis le Saguenay marquait la frontière. Sur le traversier, j’ai longuement regardé en arrière. J’ai remercié, rendu grâces, et confié ce Peuple à la tendresse de Dieu et à la force de la Parole. Puis je me suis tourné vers l’autre rive.

†Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau
(à suivre)