vendredi 4 janvier 2013

Vatican II et l’Église Peuple de Dieu

Certaines personnes, quand elles parlent de l’Église, réfèrent en fait au pape, aux évêques. D’autres n’y voient qu’une communauté de foi sans structures permanentes. Telle ne fut pas la vision des évêques exprimée dans le texte conciliaire : « L’Église » (par 8). L’Église y est vue inséparablement comme une réalité visible et invisible, comme une communauté spirituelle et comme une société structurée visiblement. En somme, l’Église, c’est le Peuple de Dieu structuré hiérarchiquement.

En décidant de traiter du Peuple de Dieu avant de considérer les évêques, les prêtres, les laïcs, les religieux et religieuses, les évêques en concile ont transformé une façon de percevoir l’Église qui avait duré des siècles en retrouvant sa densité et son enracinement bibliques. On y montre un aspect très dynamique de l’Église qui est présentée comme un peuple en marche. L'Église est d’abord une communauté et c’est dans cette communauté et non au-dessus que se trouve une structure hiérarchique organisée socialement au service de l’unité et du gouvernement de la communauté. C’est un Peuple ainsi structuré qui porte la mission pour que vienne le Règne de Dieu.

Dieu ne veut pas pêcher à la ligne mais au filet! Il nous veut en communauté. « Le bon vouloir de Dieu a été que les hommes ne reçoivent pas la sanctification et le salut séparément, hors de tout lien mutuel; il a voulu en faire un peuple qui le connaîtrait selon la vérité et le servirait dans la sainteté. » (par. 9) Cette notion de Peuple de Dieu affirme que tous les membres de l’Église sont égaux dans la même dignité et la même responsabilité. Tous sont appelés à être actifs et participants, selon une grande diversité d’appels de grâce, de vocation et de dons divers.

Ce peuple messianique a pour chef le Christ. Le statut de ce peuple, c’est la dignité et la liberté des fils de Dieu. Sa loi, c’est le commandement nouveau d’aimer comme le Christ lui-même nous a aimés (cf. Jn 13, 34). Sa destinée enfin, c’est le Royaume de Dieu. « C’est pourquoi ce peuple messianique, bien qu’il ne comprenne pas encore effectivement l’universalité des hommes et qu’il garde souvent les apparences d’un petit troupeau, constitue cependant pour tout l’ensemble du genre humain le germe le plus sûr d’unité, d’espérance et de salut. »

Notons l’entrée des charismes dans la conscience de l’Église contemporaine. L’Esprit Saint « ne se borne pas à sanctifier le Peuple de Dieu par les sacrements et les ministères, à le conduire et à lui donner l’ornement des vertus, il distribue aussi parmi les fidèles de tous ordres, “répartissant ses dons à son gré en chacun” (1 Co 12, 11), les grâces spéciales qui rendent apte et disponible pour assumer les diverses charges et offices utiles au renouvellement et au développement de l’Église, suivant ce qu’il est dit : “C’est toujours pour le bien commun que le don de l’Esprit se manifeste dans un homme” (1 Co 12, 7). Ces grâces, des plus éclatantes aux plus simples et aux plus largement diffusées, doivent être reçues avec action de grâce et apporter consolation, étant avant tout ajustées aux nécessités de l’Église et destinées à y répondre. » (p. 12)

Depuis cinquante ans, que de découvertes très riches dans ce filon qui était enfoui dans la conscience profonde du Peuple de Dieu et qui a refait surface, parfois même avec exubérance!
(21e texte d’une série sur Vatican II)
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau