vendredi 30 mars 2012

Arrêter, respirer, se calmer

Nous sommes très occupés. Enfants et jeunes sont accaparés par les sports, les loisirs, parfois aussi un travail presque à plein temps. Les jeunes parents doivent en fin de semaine accumuler les entretiens ménagers, les achats, l’accompagnement des enfants  dans les loisirs et sports. Puis la vie professionnelle ou sociale prend beaucoup de place. Enfin, lorsqu’on arrive à la retraite, « on est plus occupé qu’avant »!

Notre vie est prise dans un filet d’occupations qui nous essoufflent, sans peut-être que nous nous en rendions compte tellement l’habitude est entré en nous. Ce rythme effréné de vie devient normal. La publicité, la concurrence, les exigences commerciales, financières ou celles à sans cesse performer nous y contraignent en quelque sorte. Ne sommes-nous devenus des  esclaves de « la tyrannie de l’horloge »?

Comment nous en délivrer? Ce n’est pas une nouvelle question. Des centaines d’années avant Jésus, son peuple se la posait déjà. Et la réponse fut communautaire : l’institution d’une journée d’arrêt après six jours de travail. Appelé sabbat, ce jour était destiné à assurer la cessation des travaux et le repos pour tous. C’est devenu une loi sans cesse rappelée au Peuple choisi : «Pendant six jours tu travailleras et tu feras tout ton ouvrage, mais le septième jour est un sabbat pour le Seigneur ton Dieu. Tu n'y feras aucun ouvrage, toi, ni ton fils, ni ta fille, ni ton serviteur, ni ta servante, ni ton bœuf, ni ton âne ni aucune de tes bêtes, ni l'étranger qui est dans tes portes.»

Tous doivent pouvoir se reposer : maître, serviteurs et servantes, animaux. Le souvenir de la misère et de l’esclavage en Égypte motive un tel jour qui est une libération de l’esclavage d’un travail qui tue le cœur et l’âme, ainsi que  les relations familiales, sociales et celles avec Dieu.

Ce jour d'arrêt et de repos fut reconnu comme si essentiel à la survie du peuple qu’on en a fait le signe de l’alliance avec Dieu. Se reposer le septième jour, c’est imiter Dieu qui conclut en six jour l'ouvrage de la création et chôma le septième jour. «Dieu bénit le septième jour et le sanctifia, car il avait chômé après tout son ouvrage de création ».

Le sabbat est le signe perpétuel de l’alliance infrangible entre Dieu et son peuple. C’est un jour pour se souvenir du Dieu créateur, pour se reconnaître sa créature qu’il veut comme lui libre, heureuse, dans une communauté harmonieuse de vie et de destin. C’est un jour « délicieux et vénérable ».

Les lois assurant ce jour de repos devinrent toutefois si rigoureuses que Jésus s’est senti obligé de rappeler le sens essentiel de ce jour d’arrêt et de repos : « Le sabbat a été fait pour l’homme et non l’homme pour le sabbat. »

Pour nous chrétiens, ce jour de repos est le dimanche. C’est le premier jour de la semaine, qui nous rappelle hebdomadairement la résurrection de Jésus et ses apparitions de semaine en semaine à ses amis avant de cesser de leur apparaître. Le dimanche est « le Jour du Seigneur » destiné à alléger nos fardeaux pour entrer ainsi chaque semaine dans le repos même de Dieu et le service de nos frères et sœurs. C’est en prenant le temps de creuser dans notre cœur un espace pour Dieu que nous pouvons devenir disponibles pour celles et ceux auxquels personne ne pense, qui sont rejetés, marginalisés.

Qu’avons-nous fait de ce jour de repos, d’ouverture du cœur à Dieu, de don de soi aux autres? Dans une lettre de cent pages, Jean-Paul II a analysé pour nous le sens du dimanche ainsi que ses diverses composantes. Et il a insisté pour affirmer que nous ne pouvons pas y renoncer : « Au seuil du troisième millénaire, la célébration du dimanche chrétien, pour les significations qu'il évoque et les dimensions qu'il implique par rapport aux fondements mêmes de la foi, demeure un élément déterminant de l'identité chrétienne » (paragraphe 30). C’est un texte très actuel alors que tant d’obstacles s’opposent à ce jour de liberté, de joie, de vie familiale et communautaire.

† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau

dimanche 25 mars 2012

Pour promouvoir les buts humains de nos diverses activités

Le Programme des Nations-Unies pour le Développement existe pour promouvoir les objectifs du millénaire sur le développement adoptés par l’Assemblée générale des Nations-Unies en l’an 2000.  Cette assemblée mondiale y affirme que pour promouvoir un « monde plus pacifique, plus prospère et plus juste […] nous reconnaissons que, en plus des responsabilités propres que nous devons assumer à l’égard de nos sociétés respectives, nous sommes collectivement tenus de défendre, au niveau mondial, les principes de la dignité humaine, de l’égalité et de l’équité. En tant que dirigeants, nous avons donc des devoirs à l’égard de tous les citoyens du monde, en particulier les personnes les plus vulnérables, et tout spécialement les enfants, à qui l’avenir appartient. »

Les membres de l’Assemblée générale ajoutent que pour que la mondialisation devienne une force positive pour l’humanité entière, il faut planétairement instaurer la liberté, l’égalité, la solidarité, la tolérance, le respect de la nature, le partage des responsabilités. L’assemblée fixe ensuite des objectifs audacieux pour le millénaire commençant. Ce sont ces objectifs que reprend le Programme des Nations-Unies pour le Développement. À travers de multiples interventions, il vise à accélérer le progrès vers un monde plus équitable.

Ce Programme publie un rapport annuel. Celui de 1990 affirmait : « Les personnes sont la vraie richesse d’une nation. ». « Si la croissance du Produit National Brut (PNB) est indispensable  pour atteindre tous les objectifs humains essentiels, l'important c'est d'analyser comment cette croissance se traduit - ou ne se traduit pas - en développement humain dans différentes sociétés ». Il annonçait ainsi une approche nouvelle du développement. Et d’année en année, depuis 20 ans, le rapport annuel insiste sur le fait que le développement est avant tout et fondamentalement une question de personnes.

En regardant un de ces récents rapports, je me suis rappelé un texte voté par le Concile Vatican II en 1965. Ce texte me semble toujours d’une grande actualité. Car nous sommes sans cesse tentés d’oublier que toutes nos activités humaines ont pour but le mieux vivre des humains et la qualité de leur vie en commun, dans le respect des conditions pour y parvenir.

« De même qu’elle procède de l’homme, l’activité humaine lui est ordonnée. De fait, par son action, l’homme ne transforme pas seulement les choses et la société, il se parfait lui-même. Il apprend bien des choses, il développe ses facultés, il sort de lui-même et se dépasse. Cet essor, bien conduit, est d’un tout autre prix que l’accumulation possible de richesses extérieures. L’homme vaut plus par ce qu’il est que par ce qu’il a. De même, tout ce que font les hommes pour faire régner plus de justice, une fraternité plus étendue, un ordre plus humain dans les rapports sociaux, dépasse en valeur les progrès techniques. Car ceux-ci peuvent bien fournir la base matérielle de la promotion humaine, mais ils sont tout à fait impuissants, par eux seuls, à la réaliser. »

« Voici donc la règle de l’activité humaine : qu’elle soit conforme au bien authentique de l’humanité, selon le dessein et la volonté de Dieu, et qu’elle permette à l’homme, considéré comme individu ou comme membre de la société, de s’épanouir selon la plénitude de sa vocation. »

Un long chemin est ainsi tracé pour notre humanité. Mais chaque personne peut y faire un pas qui, s’ajoutant à des millions d’autres pas dans le même sens, entretient l’espérance d’une société où on ait plus de cœur les uns pour les autres, dans le respect des différences et dans la paix.

† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau

mardi 20 mars 2012

Réparateurs de brèches et Restaurateurs de ponts

Un texte du grand prophète Isaïe me bouleverse. Dieu y affirme ce qu’il attend de nous: « Si tu fais disparaître de chez toi le joug, le geste menaçant et les paroles méchantes, si tu donnes de bon cœur à l'affamé et si tu combles les désirs du malheureux, ta lumière se lèvera dans les ténèbres, et ton obscurité sera comme la lumière de midi.  Le Seigneur sans cesse sera ton guide. En plein désert, il te comblera et te rendra vigueur. Tu seras comme un jardin bien arrosé, comme une source jaillissante dont les eaux ne tarissent pas. Tu rebâtiras les ruines antiques, tu relèveras les fondations des générations passées, on t'appellera le Réparateur de brèches, le Restaurateur qui remet en service les routes. »

On parle beaucoup des ponts qui tombent, de ceux qu’il faut réparer de toute urgence, de ceux qu’il faut entièrement reconstruire. Chacun sait que les ponts sont essentiels à la circulation des personnes et des biens de touts sortes dans le village, entre les villes, à travers la province. Ce sont des liens essentiels pour assurer les communications de toutes sortes entre les humains. Aussi nous savons comment il est nécessaire de sans cesse entretenir ces routes, réparer ces ponts, boucher les brèches qui peuvent se creuser dans l’asphalte et piéger la circulation.

Mais on ne parle par souvent des ponts détruits, les routes abandonnées parce que trop saccagées, les brèches terribles qui sont autant de balafres sur le visage et les cœurs de tant de couples, de familles, de villages, de pays entiers. Je pense à toutes ces personnes mises au rancart par notre société, marginalisées parce que pauvres, différentes, malades, vieilles souffrent de ces déchirures. Il y a des brèches terribles dans notre tissu social et humain. Les ponts de nos relations humaines sont souvent rompus ou au moins distendus au point de se rompre. Que de souffrances alors, de larmes, de solitudes, de rejets!

Et il ne faut pas être myopes et avoir les yeux et le cœur fermés sur la situation de toute notre planète. Elle est profondément déchirée. On parle maintenant même de quart-monde. Il y a la minorité plutôt à l’aise qui profite en abondance des ressources de toutes sortes de notre terre et les gaspille sans vergogne. Puis il y a les multitudes considérées comme engluées dans leurs misères et leurs maladies, que nos préjugés stigmatisent en affirmant qu’elles sont responsables de leur sort. Et plus on regarde le tissu de notre planète qu’on dit en voie de mondialisation, plus on voit la grande mission que le prophète déjà transmettait au nom de Dieu il  y a plus de 2600 ans et qui est encore tellement actuelle, toujours plus actuelle.

Par ces textes repris dans la liturgie des messes du carême, Dieu nous invite aujourd’hui à devenir des Réparateurs de ces brèches et des Restaurateurs de ponts. Il nous convoque à changer nos regards et nos habitudes envers nos frères et sœurs les humains. Il nous demande d’ouvrir les oreilles de nos cœurs pour entendre le cri de misère qui monte de l'humanité, d’ouvrir les yeux de nos cœurs à tout ce spectacle de la détresse humaine, aux larmes et au sang versé : aux affamés, opprimés, pauvres, tous ceux et celles qui sont les captifs de la mort et de la misère.

Mais quel est le pont le plus urgent à restaurer, la brèche la plus grave qui cause toutes les autres et donc qui appelle d’urgence notre attention? L’urgence primordiale est de réparer la brèche entre Dieu et les humains, de refaire les ponts entre Dieu et notre humanité. C’est d’ailleurs ce que Dieu cherche à faire depuis les origines, où après avoir demandé à Caïn où est son frère et ce qu’il a fait de son sang, il a mis le signe protecteur sur la tête du meurtrier de son frère afin que la spirale de la violence, de la haine, de la destruction n’éclate pas. Mais tout de suite apparaît la haine plus forte que l’amour et le pardon. Sans cesse Dieu essaie de réparer la brèche. C'est toute l’histoire des relations entre Dieu et nous les humains, pour notre vie et notre bonheur : Dieu qui essaie d'ouvrir une route dans ce désert de souffrances, de misères dont nous avons tous une parcelle dans notre cœur. C’est cela l'essentiel.

Notre Bible nous dit qu’à la source du drame de l'humanité, il y a cette brèche: moins les humains regardent vers Dieu, plus ils deviennent meurtriers les uns pour les autres, chacun  s'accrochant à ses biens, au pouvoir qui est le sien. Plus l'homme veut être le centre de tout, plus il  blesse et tue autour de lui. Moins on regarde Dieu tel qu'il est, tel qu'il s'est révélé dans le Christ Jésus qui est notre véritable Chemin et le Réparateur de nos brèches, plus on devient face aux autres tentés par cette volonté de garder ses privilèges et son pouvoir, sources de cruauté, d'injustice, de sang versé, de mort. Il suffit de regarder la télévision et de lire les journaux pour le constater, si on sait voir ou lire.

Être Réparateur de brèches et Restaurateur de chemins défoncés et ruinés : voilà notre mission face à Dieu et face à l’humanité. Et n’oublions surtout par cette brèche originelle et foncière, cause des autres, qui fait qu'entre le Dieu et nous il y a l’amitié, pourtant essentielle, qui est rompue. Nous sommes appelés par notre humanité même et encore plus par notre baptême à être des restaurateurs de l’authentique relation entre Dieu et l'humanité, qui sera source de vigueur, de générosité, de joie de vivre, d’amour et de paix dans la solidarité et la justice débordant en miséricordes venant du cœur.

† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau

dimanche 18 mars 2012

Pour une écologie humaine

Le mot : « écologie », inventé au milieu du XIXième siècle, ne devint populaire que dans la seconde moitié du XXième, la science écologique s’étant alors imposée.  Je me souviens de la première fois que je l’ai entendu. Ce devait être durant l’année 1971.  J’étais en conversation avec un professeur au niveau secondaire. Et il s’est mis à employer ce mot, alors barbare pour moi! Il a essayé de m’expliquer ce que ca voulait dire mais j’avoue qu’il n’a pas réussi alors à me convaincre de son opportunité. J’ai changé d’idée depuis!

Nous sommes habitués à l’emploi de ce concept pour parler de la nature et de ce que nous en faisons. Nous avons pris conscience de nos solidarités complexes et vitales avec tout l’univers. Une multitude de sciences usent de ce concept pour approfondir les diverses réalités de notre monde.

Ce mot revient constamment dans les médias quotidiens. Nous sommes maintenant habitués de voir les « écologistes » en lutte contre toutes sortes de pollutions, destructions et autres phénomènes qui jaillissent de nos développements scientifiques, technologiques et de nos besoins quotidiens.  Certains groupes sont très connus et ont une portée continentale. Par ailleurs, pensons aux élèves d’une école qui font une campagne pour le ramassage des déchets, ou pour bien d’autres objectifs qu’on doit appeler « écologiques ».

Mais le concept d’écologie humaine me semble moins répandu. C’est pour soutenir une telle réflexion que je reproduis ici les remarques de Benoît XVI aux ambassadeurs de plusieurs pays, ce qui montre bien que cette écologie humaine concerne le bien commun de nos groupes et de toute la planète.

Le Pape vient de parler des innombrables tragédies qui ont touché la nature, la technique et les peuples au début de l’année 2011. Il ajoute : « L’ampleur de telles catastrophes nous interroge. C’est l’homme qui est premier, il est bon de le rappeler. L’homme, à qui Dieu a confié la bonne gestion de la nature, ne peut pas être dominé par la technique et devenir son sujet. Une telle prise de conscience doit amener les États à réfléchir ensemble sur l’avenir à court terme de la planète, face à leurs responsabilités à l’égard de notre vie et des technologies. L’écologie humaine est une nécessité impérative. Adopter en tout une manière de vivre respectueuse de l’environnement et soutenir la recherche et l’exploitation d’énergies propres qui sauvegardent le patrimoine de la création et sont sans danger pour l’homme, doivent être des priorités politiques et économiques. Dans ce sens, il s’avère nécessaire de revoir totalement notre approche de la nature. Elle n’est pas uniquement un espace exploitable ou ludique. Elle est le lieu natif de l’homme, sa "maison" en quelque sorte. Elle nous est essentielle. Le changement de mentalité dans ce domaine, voire les contraintes que cela entraine, doit permettre d’arriver rapidement à un art de vivre ensemble qui respecte l’alliance entre l’homme et la nature, sans laquelle la famille humaine risque de disparaître. Une réflexion sérieuse doit donc être conduite et des solutions précises et viables doivent être proposées. L’ensemble des gouvernants doit s’engager à protéger la nature et l’aider à remplir son rôle essentiel pour la survie de l’humanité. Les Nations Unies me semblent être le cadre naturel d’une telle réflexion qui ne devra pas être obscurcie par des intérêts politiques et économiques aveuglément partisans, afin de privilégier la solidarité par rapport à l’intérêt particulier. »

† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau

mercredi 14 mars 2012

Devenir membre de ce blogue

Depuis le mois de juin 2011, à la veille de prendre ma retraite, j'ai décidé d'explorer ce nouvel outil de communication, un blogue. C'est ainsi que j'ai lancé mon blogue pour y partager mes réflexions sur la vie de l'Église, la société et les sujets d'actualité qui se présentent à nous au quotidien. Intitulé Réflexions, ce blogue se veut un lieu ouvert où je vous partage mes réflexions, mes pensées et ma lecture de l'actualité à la lumière de l'Évangile. De là, les visiteurs peuvent alimenter leur propre réflexion et peut-être y voir là une invitation à poser un geste de partage, de solidarité, d'amour ou d'amitié.

Si vous voulez suivre de plus près mes réflexions et mes aventures de blogueur, je vous invite à devenir membre de mon blogue. Dans le blogue, il y a un onglet, à droite, intitulé Membre. De là, si vous avez déjà un compte avec Google, Twitter ou Yahoo, vous pouvez vous connecter et vous inscrire. Si non, vous pouvez vous créer un compte Google et par la suite vous inscrire à mon blogue.

Je tiens à remercier les personnes qui se sont inscrites dès les débuts de cette belle aventure ou encore plus récemment. C'est donc une invitation.

† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau

dimanche 11 mars 2012

L’Esprit-Saint vient faire germer nos déserts

Depuis le 22 février dernier, nous sommes entrés en carême. Il s’agit des quarante jours qui nous préparent à la grande fête de Pâques. C’est là un temps bien spécial pour imiter Jésus et nous conduire comme lui, en véritables enfants de Dieu.

Jésus a été baptisé par le grand prophète Jean-Baptiste. « Et aussitôt, remontant de l'eau, il vit les cieux se déchirer et l'Esprit comme une colombe descendre vers lui, et une voix vint des cieux: "Tu es mon Fils bien‑aimé, tu as toute ma faveur." Et aussitôt, l'Esprit le pousse au désert » (Marc 1, 10-12). Là Jésus a prié, et il a jeuné pendant quarante jours.

Nous aussi les croyantes et croyants en Jésus, avons été baptisés. Nous y avons été identifiés à Jésus le Fils Unique et bien-aimé pour être nous aussi filles et fils de Dieu. Certes, nous le sommes par adoption alors que Jésus et l’unique Fils éternel du Père. Mais nous le sommes vraiment. Nous sommes par le baptême changés en profondeur. Car à notre baptême l’Esprit même de Jésus a été versé en nous en même temps que l’amour du Père. Et alors, « tous ceux qu'anime l'Esprit de Dieu sont fils de Dieu. Aussi bien n'avez vous pas reçu un esprit d'esclaves pour retomber dans la crainte; vous avez reçu un esprit de fils adoptifs qui nous fait nous écrier: Abba! Père! L'Esprit en personne se joint à notre esprit pour attester que nous sommes enfants de Dieu. Enfants, et donc héritiers; héritiers de Dieu, et cohéritiers du Christ, puisque nous souffrons avec lui pour être aussi glorifiés avec lui » (Romains 8,14-17).

Nous sommes donc nous aussi, tout comme Jésus, poussés par l’Esprit pour entrer dans ce désert du carême.  Il s’agit du désert de nos habitudes mauvaises, de nos ignorances de la Parole de Dieu, de nos stérilités spirituelles de toutes sortes, de notre refus de nous priver de tant de caprices et de choses superflues. Nous sommes appelés à faire comme Jésus, avec les yeux fixés sur lui notre guide et avec la force de ce même Esprit qui l’a soutenu durant tous ces jours de luttes. Nous allons au désert avec Jésus pour répondre avec lui aux tentations de l’Ennemi, le Menteur, Satan.

Le Menteur le tente en l’invitant à satisfaire sa faim par un miracle en sa propre faveur (ce que Jésus n’a jamais fait). Jésus lui répond : « Il est écrit: Ce n'est pas de pain seul que vivra l'homme, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu ». Le Tentateur l’incite à éblouir les foules en se jetant en bas du pignon le plus haut du temple. Il pourrait ainsi conquérir les foules pour sa gloire. Mais Jésus refuse : « Il est encore écrit: Tu ne tenteras pas le Seigneur, ton Dieu. » Enfin Satan avec un sans gêne incroyable et une impudent effroyable invite Jésus à l’adorer, lui promettant la suprématie sur tous les royaumes de la terre, prétendant que tout cela lui appartient. Et Jésus répond encore en citant les Écriture : « Retire‑toi, Satan! Car il est écrit: C'est le Seigneur ton Dieu que tu adoreras, et à Lui seul tu rendras un culte. » (Matthieu 4,1-11).

Nous aussi, l’Esprit de Dieu nous invite durant ce temps de préparation au renouvellement de nos promesses baptismales à faire comme Jésus : à jeuner, à prier et à donner généreusement ce que nous avons et ce que nous sommes. Et pour nous y soutenir, les Paroles de Dieu nous sont abondamment offertes à chaque jour de la semaine et surtout dans les messes des dimanches. Il faut accueillir ces Paroles de notre Père avec un cœur simple, confiant et fervent, les méditer, les mâcher, les digérer, les faire passer dans notre vie. Prière, jeûne et aumônes, voilà les pratiques que nous sommes invités à vivre pour que la nuit de Pâques, nos déserts puissent être transformés, revitalisés, et refleurir grâce à l’eau baptismale, le feu de la grâce et notre engagement renouvelé à suivre Jésus dans la certitude de la foi que nous sommes tendrement chéris par Dieu.

† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau

dimanche 4 mars 2012

Médaille Eugène de Mazenod

L’Université Saint-Paul, à l’occasion de la soirée hommage de Communications et Société qui avait lieu au Salon du Livre de l’Outaouais, le 2 mars dernier, m’a décerné la médaille Eugène de Mazenod. Dans mes brefs commentaires, après avoir reçu cette médaille, j’ai essayé d’insérer cette haute distinction avec l’ensemble de mon orientation vers les communications vues comme ayant des finalités de communion et de progrès des humains.
 
Sur la médaille Eugène de Mazenod, on y trouve gravé des mots dynamiques et qui rappellent et Mgr de Mazenod et les Pères Oblats. L’Université Saint-Paul explique que «cette médaille au nom du fondateur des Oblats de Marie Immaculée fait écho au souci majeur de ce dernier de s’adapter à la situation réelle des gens, en faisant preuve d’audace et de zèle en répondant aux urgences ». Je tiens à remercier l'Université St-Paul pour cet hommage imprévu qui m’a beaucoup touché.
 
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau

Hommage de Communications et Société

Le 2 mars dernier, l’organisme Communications et Société, en collaboration avec les diocèses de Gatineau et d’Ottawa, de même que de l’Université Saint-Paul, a voulu m’offrir un prix « Hommage », dans le cadre de sa remise annuelle des « prix du livre », événement qui s’est déroulé au Salon du Livre de l’Outaouais. J’ai été très touché par cette identification publique de mes engagements dans le domaine si riche, si varié et si mouvant des communications.

Dans le communiqué de presse qui a fait écho à cet événement, on m’a gracieusement identifié comme un « pasteur qui tant à Baie-Comeau (de 1979 à 1988) qu’à Gatineau a toujours su communiquer par l’entremise des médias. Il s’est aussi démarqué par ses prises de parole publiques et ses écrits. Encore aujourd’hui, il partage ses réflexions par son blogue personnel ». Il est fort exact que je me suis beaucoup impliqué dans les divers médias qui ont tellement évolué au cours de ces 50 ans de mon service presbytéral puis épiscopal vécu dans tellement de milieux différents. J’ai aimé écrire des articles et des livres. Le journal régional a été pour moi, pendant des années, un lieu de conversation avec la communauté locale ou régionale pour échanger pensées, projets, engagements. J’ai tout particulièrement découvert la puissance de communication, de feedback et de création de liens de la radio. J’ai vécu avec enthousiasme l’apport de l’image et de ses multiple richesse et possibilités à la télévision, aussi dans la pédagogie comme pour le divertissement. Les médias sociaux sont arrivés et je m’y essaie un peu par mon blogue…

Dans mon mot de remerciements que j’ai formulé, lors de la remise de cet « hommage », j’ai tenté de rappeler les racines anthropologiques, philosophiques et religieuses de mes engagements dans tous ces domaines. Les divers moyens de communication jaillissent de nos cœurs, de nos intelligences, de nos esprits humains. Et ils sont destinés à soutenir, stimuler, provoquer le dialogue, le partage, la solidarité entre les humains dans cette humanité qui se mondialise. Mon souci fut toujours dans mes engagements de contribuer, ne serait-ce que si peu, à ce que ces médias ne fassent pas de notre humanité une sorte de « tribu électronifiée » mais provoquent la croissance des personnes libres et participant à la création de la fraternité mondiale et à la liberté, dans un souci toujours vigilant pour les plus blessées, les plus pauvres de notre humanité.

† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau